dimanche 23 novembre 2008

Quand j'ai commencé ce blog en septembre dernier, c'était juste pour raconter au jour le jour ce que nous vivions tous les trois. Au début je voulais envoyer une lettre chaque semaine à Daniel Vaillant pour lui décrire concrètement ce que c'est que d'être sans logement, car j'avais l'impression qu'à la mairie, ils ne s'en rendaient pas bien compte. Et puis je me disais que ça changerait des lettres purement administratives, j'avais l'impression que de toutes façons elles terminaient toutes sur un tas de dossiers. J'aurais peut-être plus de chances comme ça d'avoir une réponse du maire... C'est mon frère qui m'a suggéré d'en faire un blog. J'ai hésité, je n'étais pas sûre de vouloir que tout le monde puisse lire ma vie... Et je ne voyais pas du tout comment les gens pourraient tomber dessus... J'étais loin d'imaginer l'ampleur que ça allait prendre !

Ces derniers jours, je dois dire que je me suis sentie vraiment dépassée, il m'a fallu prendre un peu de recul. J'ai reçu énormément de messages de soutien, de propositions, d'offres d'aide, de conseils, d'encouragements ! On nous a proposé des hébergements temporaires, des coups de main pour des déménagements, des petits tuyaux pour que les enfants se sentent bien, des dons d'habits, on m'a même proposé de garder les enfants. Des gens m'ont écrit de partout dans le monde, des hommes et des femmes de toute classe sociale, parents ou pas, des anciens SDF, des grands-pères et des grands-mères, des étudiants, et même des adolescents qui me disent : « J'ai 12 ans mais je trouve tout de même ça révoltant !» Je voudrais vraiment pouvoir remercier chacun d'entre vous, c'est incroyable que tant de gens se sentent touchés par notre situation, et vous n'imaginez pas à quel point c'est réconfortant de sentir que l'on n'est pas tout seul !

J'ai reçu aussi beaucoup d'autres sollicitations de la presse, de radios et de télés. Pour l'instant j'ai préféré ne pas donner suite. Ma priorité actuellement est de trouver un logement et de m'occuper de mes enfants. J'ai commencé ce blog dans cette urgence et je vais continuer, mais je n'ai pas le temps de faire plus, et je ne veux pas nous exposer davantage. Certaines personnes voudraient faire de moi l'égérie des mal-logés. Mais je ne me vois pas dans ce rôle-là, je n'ai pas l'âme d'une porte-parole, ça ne me ressemble pas du tout. Bien sûr, je veux que ce qui se passe en ce moment soit utile à tous ceux qui comme nous ont besoin d'un toit. Mais tout ce que je peux faire, je le fais par ce blog. Il y a même plusieurs éditeurs qui m'ont proposé de faire un livre ! Cela m'a bien fait rire, c'est un peu exagéré quand même !

Cependant j'ai accepté de rencontrer une journaliste de l'émission « Arrêt sur image » qui est diffusée sur internet, mais c'est pour un article écrit qui est paru sur leur site. Leur démarche est différente, l'article parle de la solidarité qui s'est créée chez les « mamans blogueuses » et tente de retracer comment le mouvement s'est formé. Et j'avoue que j'étais curieuse de le comprendre ! Ce qui est amusant, c'est que la journaliste a retrouvé la première personne qui a mis mon blog en lien depuis le sien ("la mare enchantée"), et il se trouve que je connais très bien cette personne, mais elle ne m'avait pas mise au courant de sa démarche. Et si ça se trouve, tout a commencé grâce à elle...

J'ai vu aussi qu'il y a eu quelques débats sur le blog et apparemment ailleurs. J'imagine que c'est inévitable quand on fait l'objet d'un article à la fois aussi personnel et aussi public. Je ne tiens pas à répondre à des critiques souvent mal informées, mais je voudrais préciser deux-trois choses qui étaient peut-être ambiguës dans l'article du Monde.

D'abord, l'article laisse entendre que j'avais un « emploi » à Bordeaux que j'aurais quitté pour venir à Paris. En réalité, j'étais en formation dans les chevaux et nous avions une semaine d'école pour deux semaines de stage. J'ai ainsi travaillé dans des écuries pendant quatre ans mais sans être rémunérée. Lorsque j'ai quitté Bordeaux, il y a maintenant dix ans, c'était à la fin de ma formation, je n'avais pas de travail. C'est en arrivant à Paris que j'ai commencé à gagner ma vie en faisant des petits boulots.

Par ailleurs, concernant Madiop, le père de mes enfants, je ne voudrais pas qu'on imagine que c'est quelqu'un d'absent, de négligent, ou d'irresponsable. Nous sommes séparés mais nous restons proches et nous nous respectons beaucoup. Financièrement, il n'a pas actuellement la capacité de m'aider, mais chaque fois qu'il le peut, il est présent pour les enfants. Souvent, je quitte tard le travail et c'est lui qui se charge d'aller chercher Jules à l'école et Orphée à la crèche, et il les garde régulièrement le soir.

Enfin, je voudrais répondre aux gens nombreux qui me conseillent de quitter Paris pour la banlieue ou la province. Si je ne le fais pas, ce n'est pas par entêtement, c'est que la question ne se pose pas vraiment : toute ma vie est ici. Mon travail est ici, le père de mes enfants est ici, mon frère est ici, mes amis sont ici, l'école de Jules est ici, tous ses copains sont ici, la crèche d'Orphée est ici... Si je pars de Paris je n'aurai plus rien. Je veux rester à Paris parce que maintenant c'est chez moi, voilà tout. Je ne veux pas que ce soit un luxe réservé aux riches. Je pense que chacun devrait être libre de vivre où il le souhaite, quels que soient ses revenus.

Et voilà que même M. Vaillant m'a laissé un commentaire jeudi soir ! Je le remercie beaucoup de sa réponse que j'ai lue attentivement. Je ne doute pas que lui et son équipe fassent de leur mieux pour régler le problème du logement dans le 18ème. Qu'il se rassure, je n'ai jamais pensé que la médiatisation suffirait à avoir un logement social tout de suite. Ça serait trop facile s'il suffisait de passer dans un journal et hop tout est réglé !

Je ne demande pas un traitement de faveur. Je suis bien consciente des difficultés de la mairie avec toutes les demandes d'urgence, mais il y a un vrai problème et j'en fais partie.

Si je peux donner mon avis, je trouve déprimant que la réponse des politiques soit toujours : "On ne peut rien faire de plus..." Je ne sais pas ce que les politiques devraient faire pour régler le problème du logement, mais c'est à eux de le savoir, pas à moi ! S'ils sont d'accord pour dire que ce n'est pas normal que des dizaines de familles soient à la rue, s'ils sont d'accord que des cas comme le nôtre ne sont pas isolés mais qu'il y a un vrai problème social, c'est leur travail à eux de trouver des solutions, non ?

M. Vaillant, vous avez certainement raison de rappeler que les règles sont les règles et qu'elles sont les mêmes pour tous. Je suis bien d'accord. Mais je n'oublie pas que les règles, c'est vous qui les faites ! C'est votre responsabilité de décider de construire plus de logements sociaux, de décider s'il vaut mieux les attribuer aux plus pauvres ou bien aux classes moyennes, de décider si les gens qui dépassent les plafonds doivent encore être logés par les HLM ou s'il faut davantage de roulement... Je comprends quand mon assistant social me dit qu'il ne peut rien faire de plus, parce que je sais que ses moyens d'actions sont limités par les choix qu'ont faits les élus. Mais vous, vous ne devriez pas pouvoir dire cela, car c'est votre rôle de politique de trouver des solutions aux problèmes, non ? C'est difficile, je veux bien le croire, mais c'est votre travail et vous l'avez choisi.

Mon travail à moi, à mon petit niveau, c'est de vous expliquer la situation, pour que vous compreniez mieux ce que vivent les gens sans logement, et que vous puissiez mieux répondre à leurs problèmes. C'est pour cela que j'ai commencé ce blog. D'autres le font autrement, en militant ou en manifestant, moi je le fais avec ce blog. Si cela peut modifier ne serait-ce qu'un tout petit peu les politiques vis à vis du logement, alors ça n'aura pas servi à rien.

Pour ce qui est des hébergements d'urgence, c'est-à-dire de l'hôtel, c'est vrai que je n'ai pas accepté l'aide des services sociaux. M. Kossi, qui m'a reçue à la permanence, a aussi beaucoup insisté mais l'hôtel coûte extrêmement cher malgré les aides financières. On ne peut pas y vivre au quotidien comme dans un appartement (on ne peut pas cuisiner, les toilettes sont souvent sur le palier...) Et je connais tellement de familles qui y sont depuis des années...

Pour l'instant donc, pas de nouvelles des HLM, et la vie continue pareil.

Lundi, j'ai enfin trouvé un moment de libre pour aller à la cave où sont entreposés d'anciens habits de Jules que j'aurais voulu mettre à Orphée. Je suis arrivée là-bas toute contente, j'ai surpassé ma phobie du noir pour trouver la lumière au fond de la cave et j'ai ouvert la porte que j'avais fermée il y a plusieurs mois. Je n'y étais jamais revenue et je ne me souvenais pas de la façon dont on avait rangé. En fait c'est un véritable Tétris en 3D ! Tout y est empilé à la perfection du sol au plafond, et bien sûr je n'avais pas imaginé devoir récupérer des affaires au compte-goutte, ce qui fait que je n'ai rien retrouvé. J'ai refermé la porte, éteint la lumière et suis repartie un peu amère. Le soir, comme je racontais ma déception à Emmanuelle, elle s'est levée d'un coup et a sorti d'un placard plein d'habits de ses filles qui étaient trop petits et qui pouvaient aller aussi bien à des garçons !

Le week-end dernier nous n'avions pas de déménagement à faire, du coup on a pu profiter de nos journées. On est allé au parc rejoindre des amis et comme nos enfants sont du même âge et que ce sont des petits mecs, ils ont joué au foot. Ça peut paraître anodin mais ce sont juste des moments de joie.

Nous quittons l'appartement d'Emmanuelle dans quelques jours. Je lui suis très reconnaissante pour son accueil et surtout ça a été une vraie rencontre. Elle et ses filles ne sont finalement pas parties en vacances. Léah a été très malade, son état ne lui permettait pas de voyager. Du coup on a passé beaucoup de temps ensemble. L'avantage de vivre des choses difficiles, c'est que cela rend plus fort et que l'on rencontre des gens formidables.

Cette fois-ci, je vais sous-louer un appartement pour un mois. Nous restons une fois de plus dans le quartier, entre le jardin d'Eole et la rue Marx Dormoy. Mais j'espère que ce sera le dernier, et qu'ensuite nous aurons notre appartement à nous !

vendredi 14 novembre 2008

Dimanche soir on a emménagé chez Emmanuelle qui nous accueille pour deux semaines. Elle a deux filles, Louise (5 ans et demi) et Léah (3 ans). Louise et Jules ont presque le même âge mais ils ne se connaissaient pas vraiment, ils se croisaient juste l'année dernière de temps en temps à la crèche quand on venait chercher leur frère et sœur, mais ils ont vite sympathisé. Emmanuelle nous a laissé sa chambre pour que les enfants puissent s'endormir au calme et que le salon reste accessible aux adultes une fois les enfants couchés.

En général, mes fils fréquentent beaucoup plus des garçons mais ils se sont très vite adaptés aux jeux de filles. Orphée trimballe partout une Barbie qu'il a chipée à Louise et qu'il appelle « la dame ». Il prend son bain avec elle, il mange avec elle... Pas question de la lui prendre ! Il y a une bonne ambiance dans l'appartement, mardi nous sommes tous allés au parc de la Courneuve avec une autre amie qui a trois garçons, c'était chouette de sortir avec toute notre troupe...

Emmanuelle et moi on ne se connaissait pas vraiment non plus, je n'étais jamais venue chez elle par exemple. Mais on a quasiment le même âge et ça se passe super bien. On discute longuement le soir, c'est agréable de cohabiter. Depuis septembre, la plupart du temps, les gens qui nous ont prêté leur appartement n'étaient pas là : d'un côté c'est bien car on n'a moins peur de gêner, mais de l'autre c'est réconfortant de partager, de discuter, de vivre ensemble. Je n'avais pas trop le moral lundi, mais en rentrant à l'appartement il y avait mon frère (il s'occupe des enfants tous les lundis soirs) et Emmanuelle qui étaient là : on a bu un verre ensemble dans la cuisine une fois les enfants couchés, on a discuté de choses et d'autres, on a rigolé ensemble, tout de suite ça allait beaucoup mieux. Dans quelques jours Emmanuelle et ses filles partiront en vacances, la maison va nous sembler bien vide...

Les enfants vont bien. Depuis leur retour, nous sommes tous les trois détendus, du coup c'est plus facile entre nous. Ils sont juste un peu déroutés de changer toujours de chambre, de lit, de camarades, forcément ça les perturbe... La première nuit, Orphée s'est réveillé en pleine nuit et bien que je l'aie pris avec moi, il n'a pas refermé les yeux pendant une heure. Jules, lui, a toujours un peu de mal à s'endormir. Ils s'adaptent vite mais leurs nuits sont parfois agitées.

La semaine dernière on était de retour chez P. et C. qui nous avaient laissé leur appartement. J'en ai profité pour rassembler mes affaires et tout trier. Nous sommes repartis avec un seul sac, un gros sac rempli du minimum nécessaire, car dernièrement j'ai eu bien des difficultés lors de nos déménagements : on devait faire plusieurs allers-retours pour tout trimballer, ça m'est arrivé de les faire à vélo lorsque les enfants étaient à l'école et à la crèche. Je n'avais pas encore acheté mon gros sac, du coup j'avais un sac à dos et pleins de grands sacs en plastique qui débordaient. Je les coinçais comme je pouvais sur les sièges des enfants et je sillonnais les rues du 18ème sous les yeux étonnés des passants. C'était assez rocambolesque quand j'y repense…

Il y a quelques jours j'ai été contactée par le journal « Le Monde ». C'est Tiphaine, une lectrice du blog qui vit en Angola, qui leur a signalé notre existence. J'ai accepté de rencontrer la journaliste, Béatrice Gurrey, et toute la semaine nous avons été en contact. Elle a rencontré Jules et Orphée, et elle a aussi tenu à parler aux gens qui nous entourent ou nous hébergent. Il y a même un photographe qui est venu nous prendre en photo !

Béatrice m'avait demandé de ne pas en parler avant qu'il paraisse alors voilà, c'est fait, l'article est dans le Monde d'aujourd'hui, si vous voulez le lire c'est en page 3.

Je trouve incroyable qu'un si grand journal s'intéresse à notre situation ! Je suis un peu gênée de voir autant de place nous être consacrée : il y a tellement de gens qui sont dans des situations bien plus difficiles que nous, sans abri ou sans papiers, et dont personne ne parle... En même temps je dois absolument trouver rapidement un toit pour mes enfants, et l'article va peut-être aider. L'espoir que j'ai, c'est que l'article ne serve pas qu'à nous, mais à tous ceux qui cherchent un toit.

Je connais bien des familles qui sont depuis des années dans des hôtels ou dans des studios souvent piteux. On leur dit de patienter, de faire leur renouvellement de demande HLM chaque année et d'attendre. Faute de mieux, ils patientent sans rien dire. Nous, nous avons la chance d'être aidés par beaucoup de gens, amis, collègues, parents de la crèche ou de l'école, et aussi maintenant des personnes qui ne nous connaissent que par le blog et qui m'écrivent pour nous offrir l'hospitalité ! C'est tellement beau et généreux, d'un certain côté nous sommes très privilégiés !

J'en profite pour m'excuser auprès de tous ceux d'entre vous qui m'ont écrit dernièrement, car je n'arrive plus à répondre à tout le monde. Mais chaque mail et chaque commentaire m'encourage et me fait du bien !

lundi 10 novembre 2008

J'ai dû modifier mes horaires de travail pour pouvoir aller à la permanence parlementaire de Daniel Vaillant jeudi dernier : j'avais reçu quelques jours avant une lettre signée de lui dans laquelle il m'invitait à y passer entre telle et telle heure. C'était compliqué de m'organiser mais j'étais bien contente que monsieur le Maire se donne la peine de me recevoir, car j'ai beaucoup de choses à lui dire !

En arrivant là-bas, je me suis aperçue que le monsieur qui reçoit les gens n'est en fait pas Daniel Vaillant mais un assistant parlementaire... Mais je n'ai pas eu le temps d'être déçue car au moment où je m'asseyais pour patienter avec d'autres gens, le téléphone a sonné. J'ai tout de suite compris que la conversation me concernait : "Ah, Julie Lacoste, oui, on est au courant !... Mais qu'est-ce qui se passe ?... Lundi on a reçu au moins 200 mails à son sujet !... Sans compter toutes les lettres qui sont arrivées par la Poste !…Mais elle est où en ce moment ? Il faudrait signaler son cas... Ah, elle a déjà rencontré Vaillant... Mais alors qu'est ce qu'on peut faire ?..." C'était très drôle d'entendre parler de moi sans que personne ne sache que j'étais présente !

Puis il a raccroché et il a reçu les deux personnes qui étaient là avant moi. Rapidement ça a été mon tour. Je me suis levée et je me suis présentée : « Bonjour, je suis Julie Lacoste ». Je l'ai senti complètement dérouté... Il ne savait pas quoi me dire... Ni par quoi commencer... Il a ressorti mon vieux dossier et il m'a montré toutes les lettres qu'ils ont reçues ces derniers jours. Il m'a proposé d'en lire quelques unes et m'a demandé s'il pouvait regarder le blog. Je lui ai dit bien sûr, je lui expliqué que c'était public et que si j'ai décidé de le faire, c'est aussi pour informer les gens comme lui de la situation des gens comme moi... Je lui ai montré comment le lire. Je lui ai notamment fait voir le passage où je raconte que j'ai rencontré par hasard M. Vaillant, qui m'avait promis de me rappeler. Et je n'ai pas manqué de lui dire qu'il ne l'avait jamais fait.

A un moment il m'a demandé : "Mais pourquoi on ne vous a pas donné de logement ?" J'ai été tellement stupéfaite de sa question que je lui ai demandé de répéter. Il m'a reposé la même question. Je lui ai alors demandé s'il parlait des logements privés ou sociaux. Il parlait bien des logements sociaux. Alors je lui ai répondu que c'était précisément pour poser cette question que j'étais là !

Quand je lui ai raconté que je n'avais toujours pas de nouvelle de mon dossier DALO, il m'a répondu que c'était très important d'avoir cette pièce dans le dossier et que je devais aller à la CAF me renseigner. Je lui ai répondu que je pensais que la CAF était juste intermédiaire, on y dépose les dossiers et ils font suivre. Je crois que c'est à ce moment là qu'il m'a sorti : "Mais Julie, il faut se bouger !... " Je dois dire que n'ai pas très bien pris sa remarque. Je lui ai répondu un peu sèchement que je ne faisais que ça, bouger, bouger, bouger, que je me bouge tout le temps, que je n'arrête pas de bouger, et que c'est justement pour ça que j'étais devant lui, parce que je suis fatiguée de bouger : j'ai besoin d'un logement pour enfin pouvoir me poser, m'occuper de mes enfants et préparer mon concours.

Il m'a répondu qu'il ne fallait pas s'énerver, qu'on était là pour discuter... Finalement voici ce qu'il m'a dit qu'il allait faire : il va de nouveau signaler notre situation à l'adjoint chargé au logement, à la préfecture et à la mairie de Paris. Il va appeler mon assistant social. Une commission d'attribution aux logements devrait avoir lieu dans les semaines qui suivent, car cela fait longtemps qu'il n'y en a pas eu. Ils feront tout pour que mon dossier passe en commission et si je ne suis pas prise à la prochaine, mon dossier sera présenté à chaque commission jusqu'à obtention. Et vu ma situation, on peut être assez optimiste pour que j'obtienne un logement "d'ici janvier ou février"...

De mon côté, je dois de nouveau remplir un dossier à déposer à la mairie au plus tard la semaine prochaine avec tous les documents nécessaires. Un dossier que j'ai déjà rempli avec mon assistant social début septembre...

Je l'ai quand même trouvé assez sympathique, même s'il avait l'air un peu déconnecté des réalités... On m'a dit de lui qu'il était humain, raisonné, efficace... Il avait l'air complètement dépassé par l'ampleur du soutien qui est en train de se former autour de nous grâce aux lecteurs et aux lectrices du blog. En partant, il m'a dit que lorsque je serai sortie de la pièce ou que j'aurais seulement tourné le dos, ils auraient déjà reçu des dizaines de nouveaux messages, et que ça allait certainement continuer... Je lui ai dit qu'en effet, le blog est très lu en ce moment, et que ça allait sûrement faire un peu de bruit... Alors il a ajouté : « Oui, si ça se trouve, vous allez être contactée par la presse... » Je lui ai répondu en souriant : « Ah oui, ça serait bien si ça pouvait faire avancer les choses !… »

Je remercie infiniment Marion de son initiative, ainsi que toutes les personnes qui ont envoyé un courrier à la permanence de M. Vaillant : j'ai vu de mes propres yeux leur messagerie envahie par vos courriers ! Et une pile impressionnante de lettres dans mon dossier ! J'ai bon espoir que les choses changent, et si c'est le cas, ce sera grâce à vous !

dimanche 2 novembre 2008

Bonjour à tous et à toutes. Merci encore pour tous vos commentaires et vos encouragements. Cela me donne beaucoup d'énergie et de détermination dans mon combat. Comme promis, je vais essayer de répondre le plus précisément possible à toutes vos questions sur notre situation actuelle et sur les démarches en cours :

Je viens de récupérer les enfants ce week-end à Bordeaux chez ma mère. Je crois que notre courte séparation a été bénéfique pour nous trois. J'espère que l'on va repartir dans notre quotidien perturbé avec plus de force et de sérénité.

On est rentrés à Paris aujourd'hui et nous retournons pour une semaine chez P et C car ils sont absents et nous prêtent l'appartement. Ensuite nous allons chez une maman de la crèche qui nous hébergera un temps. Cela fait un moment qu'elle nous le propose. Elle habite un HLM tout près de la crèche et elle a deux filles à peu près du même âge que Jules et Orphée. Nous serons donc à l'abri et au chaud pour un petit moment, donc ne vous inquiétez pas trop !

Pour ce qui est des démarches :

Bien sûr, le maire du 18ème et le préfet ont tous deux mes dossiers de demande de logement. Je fais partie des personnes prioritaires, mais il y a tellement de personnes prioritaires !

J'ai également déposé à la CAF le dossier DALO (Droit à un Logement Opposable) il y a maintenant plus de quatre mois, mais je n'ai toujours pas reçu d'accusé de réception. Je dois rappeler l'assistant social : il y a un mois, il me disait que c'était possible que ça prenne autant de temps du fait du grand nombre de dossiers, mais maintenant je me dis que ce n'est pas normal. Je connais la lenteur de l'administration, mais j'ai peur que mon dossier se soit purement et simplement perdu.

Je suis suivie par un assistant social qui a repris mon dossier il y a peu de temps, car dans notre quartier les équipes changent très vite ! Il a entrepris toutes les démarches possibles, je crois qu'il a vraiment fait de son mieux, c'est quelqu'un de professionnel qui a su entendre notre problème. Mais il ne peut que faire suivre et appuyer le dossier, après ça lui échappe complètement. Il a fait par ailleurs divers dossiers de demande pour des foyers… Mais je ne rentrais jamais dans les critères ! Soit il faut travailler mais ne pas avoir d'enfants, soit avoir des enfants mais ne pas travailler... Après ça, je me suis un peu découragée et je n'ai plus fait de démarches auprès des foyers…

Il y a quelques mois, j'ai aussi été voir l'assistante sociale de l'université pour qui je travaille, mais dans la fonction publique, si on n'est pas titulaire on ne peut rien faire pour vous. Je travaille avec un contrat précaire, c'est pour cela que je passe les concours. Je n'ai pas écrit ce blog pour parler des emplois précaires, pourtant j'aurais beaucoup à dire à ce sujet aussi !...

Je ne travaille pas pour la ville de Paris, mais j'aurais de toute façon le même problème : non titulaire…

J'ai appelé Habitat et humanisme, une association qui m'a été recommandée par plusieurs lectrices de mon blog et sur laquelle j'ai vu un reportage l'autre jour à la télé. Une dame bien sympathique m'a répondu et elle m'a expliqué le fonctionnement de cet organisme sur la région parisienne. Ils s'occupent des familles sortant des hôtels. Mais ce n'est pas aussi simple que ça. Ce sont les organismes des logements sociaux qui leur envoient des dossiers. Bref, il est impossible de déposer de dossier chez eux. Je lui dis que ça avait l'air beaucoup plus simple à la télé, ce à quoi elle m'a répondu que la télé ne montre que ce qu'elle veut, et en l'occurrence, dans l'émission, ils n'ont parlé que de cas en province : en Île-de-France, la situation est bien plus compliquée du fait de la pénurie de logement….

J'ai une attestation d'hébergement chez des amis. Je n'habite pas chez eux, mais ça me permet de recevoir mon courrier à une adresse fixe. Cependant je vais peut-être devoir changer car la concierge n'est pas très aimable, ça la dérange de monter mon courrier parce que je ne suis pas locataire. Il existe des sociétés de domiciliation, il faut que je me renseigne.

On parle souvent de la solidarité dans les pays du sud, mais je constate qu'en France elle existe aussi et je vous remercie de nouveau pour toutes vos suggestions, démarches, manifestations d'amitié et de soutien. Je suis très touchée de toutes les propositions d'hébergement que j'ai reçues, je ne manquerai pas de vous contacter si nous sommes dans l'urgence. Je vous remercie aussi pour vos offres de vêtements, de nourriture ou autre, c'est très gentil, mais nous n'en avons simplement pas la nécessité : tout ce dont nous avons besoin, c'est d'un logement !

Salutations à tous et à toutes. Je vous redonne des nouvelles très vite.

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